Publié le 16/01/2019

Des semences locales pour des prairies naturelles typiques

Les prairies naturelles de fauche sont une véritable richesse pour le territoire auvergnat et pour le Massif central, souvent reconnus comme « la plus grande prairie de France ». Elles remplissent un rôle socio-économique primordial (fortement liées aux fromages et viandes de qualité) mais également un rôle paysager et des rôles écologiques fondamentaux (réservoir de biodiversité, puits de carbone, limitation de l’érosion des sols...).

Le maintien de la diversité, de la qualité et de la productivité des prairies de fauche est une préoccupation pour de nombreux éleveurs confrontés à des problématiques de dégradation de ces milieux : aléas climatiques, facteurs extérieurs tels que la prolifération des campagnols terrestres,  intensification de pratiques qui ont conduit à un déséquilibre de la flore… Aujourd’hui, par exemple, un éleveur qui souhaite reconstituer sa prairie en effectuant un sursemis sur une prairie ayant subi un déséquilibre se trouve confronté à une indisponibilité de semences prairiales locales et utilise donc des mélanges de semences de marché.

Ces graines du commerce, ayant été produites et sélectionnées dans des conditions de sol, d’altitude et de climat différents des zones où nous souhaitons les utiliser, peuvent éprouver des difficultés d’implantation et peuvent même entraîner une « pollution » génétique des espèces fourragères typiques du territoire. L’hybridation semences locales / semences « lointaines » conduit indirectement à une homogénéisation de la flore prairiale et donc à la diminution de la biodiversité en général. Ces semences classiques peuvent aussi représenter un coût économique assez élevé pour l’éleveur.
Avec les semences locales, pas de problème de pollution génétique, pas de problème d'acclimatation... et une possibilité de récolte par l'agriculteur lui-même et ceci à moindre coût !

Plusieurs acteurs de territoire sont aujourd’hui conscients de ces problématiques, et des initiatives voient le jour pour travailler sur l’utilisation de semences prairiales locales :

  • 2013 : projet intitulé « Milieux Ouverts Herbacés ». Le CEN Auvergne et M. André Salson, agriculteur de l’Aubrac ont mené une expérimentation de collecte de semences locales en vue de l’utilisation en sursemis sur une prairie de fauche temporaire. La récolte s’est faite à l’aide d’une moissonneuse batteuse.
  • 2016-2017 : Le CEN Auvergne s’est rapproché du Lycée Industriel du Sacré Cœur à Saint-Chély d’Apcher (48) pour faire fabriquer par deux élèves de BTS une brosseuse à graines. Financée grâce à 42 donateurs sur une plateforme collaborative en ligne et à la fondation Humus, la bien nommée « Prairiale » a été inaugurée en 2018.
  • 2018-2019 : le CEN Auvergne, Saint-Flour Communauté, l’INRA, le Conservatoire Botanique National du Massif Central, le Lycée Professionnel Agricole Louis Mallet de Saint-Flour, Geyser et une dizaine d’exploitants agricoles, mènent un projet de récolte et semis de semences locales. Au programme : récolte à la brosseuse, à la moissonneuse batteuse et test de la technique du transfert de foin vert, tests de germination, calcul de densités de fourrage, de valeur fourragère, etc. ainsi que sensibilisation aux intérêts des prairies naturelles.
  • 2020-2021 : poursuite des suivis démarrés sur le projet du territoire Saint-Flour communauté (suivis botaniques, transects fourragers, etc.). Mise en place de nouveaux tests chez des agriculteurs partenaires.
  • 2021 : le CEN Auvergne intervient pour une formation auprès des prescripteurs de semences locales (Bureau d’études, OFB, etc.)
  • 2021 : le CEN Auvergne investit dans du matériel grâce à l’aide de la Région Auvergne-Rhône-Alpes : microtracteur, remorque, roundballer, etc. Tout ce matériel permet de réaliser certains chantiers en interne et de promouvoir l’utilisation des semences locales pour la restauration des milieux naturels. Chantier test sur le plateau du Guery (63) afin de restaurer des Nardaies d’altitude. Chantier effectué avec succès avec le nouveau matériel. A suivre en 2022 pour voir si l’implantation des semences s’est bien déroulée.
  • 2021-2022 : investissement dans du matériel de récolte, de semis et de transport grâce au soutien de la Région Auvergne Rhone-Alpes. Microtracteur, 2 nouvelles brosseuses, herse, etc.
  • 2022 : plusieurs chantiers de récolte et de semis mis en œuvre aux quatre coins d’Auvergne
    • Eté 2022 : intervention auprès de deux Groupement d’intérêt économique et environnemental dans le Cantal et le Puy-de-Dôme pour présenter les méthodes de récolte et détailler la méthode de la brosseuse
    • Octobre 2022 : intervention aux journées techniques machinisme spécifique aux semences locales, à l’initiative du CEN Savoie à La Motte Servolex (73)

Le CEN Auvergne, bien identifié sur la thématique des semences locales, est régulièrement sollicité pour apporter son expérience dans le domaine en France et même à l’étranger.

Les suites : 

  • Le réseau des CEN est aussi actif sur ce sujet avec plusieurs Conservatoires d'espaces naturels testant les récoltes et les semis sur leur territoire (CEN Poitou Charente, CEN Rhône-Alpes, CEN Lorraine, etc. Aussi plusieurs brosseuses sont actuellement en cours de fabrication aux quatres coins de France.
  • Le CEN Auvergne, bien identifié sur la thématique des semences locales est régulièrement sollicité pour apporter son expérience dans le domaine en France et même à l’étranger : Espagne, Portugal et tout récemment La Colombie !